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Post-traiter, ses photos, c’est tricher !

En photographie, la prise de vue et le post-traitement ont toujours été étroitement liés. Mais bien que ce dernier soit intrinsèquement corrélé à la pratique de la photographie, il est très souvent mal perçu. J’entends souvent dire, lors du partage de mes photos, que parce que je retouche mes photos, je suis « un tricheur ». Certains commentaires se contentent même d’un « Photoshop ! » réprobateur.

Dans cet article, j’ai décidé de vous donner mon avis sur le sujet et ainsi couper court à l’idée que post-traiter c’est tricher !

Post-traitement

Le post-traitement qu’est-ce que c’est ?

Le terme de post-traitement est un terme généraliste qui comprend tout le travail de modification réalisé après la prise de vue. Recadrage de photo, ajustement des ombres, des hautes lumières, des contrastes, suppression des défauts comme les tâches ou même d’un personnage.

Il existe deux types de post-traitement :

Le développement :

Le développement des photos ne date pas de Photoshop. A l’époque de la photographie argentique, le développement existait déjà. Ce terme faisait référence au fait d’agrandir l’image imprimée sur la pellicule pour la transférer sur un format papier. Il s’agissait donc de la développer. Donc, si vous ne passiez pas par la case développement, vos clichés restaient au stade de la pellicule.

Ce terme s’est rapidement vu employé pour désigner tout le processus de traitement de l’image : de l’agrandissement à l’éclaircissement d’une zone, de la modification des contrastes à la révélation des couleurs ou, tout simplement, le recadrage de l’image.

Exemple : 
Retouche photo
Katherine Hepburn prise par Dennis Stock

Sur ces deux exemples, les notes de l’auteur ont pour objectif d’apporter des corrections pour obtenir plus ou moins de contraste sur les zones sélectionnées. Ces procédés étaient coûteux et laborieux. L’adage qui veut que « l’argentique c’était mieux car les photos n’étaient pas retouchées » semble alors bien erroné.

Qu’en est-il de nos jours ?! Aujourd’hui une très grande partie des photographes prennent des photos dans un format qui s’apparente aux pellicules d’antan, le RAW. Ce format est un fichier brut sans compression qui a pour avantage d’enregistrer plus d’informations qu’un fichier JPEG. Cependant le RAW, tout comme la pellicule, nécessite de passer par une phase de développement.

Devant cet argument, certaines personnes me rétorquent qu’elles préfèrent prendre des photos directement en JPEG afin de ne pas développer leurs clichés et ainsi d’avoir des photos brutes de capteur.

Effectivement, ces personnes ne développent pas leurs photos. Mais leur boitier le fait pour eux ! Au moment où votre appareil photo transforme les données numériques en format JPEG, il applique indépendamment de votre volonté, des valeurs que le constructeur a précédemment définies. Vous pouvez le vérifier par vous-même : prenez deux appareils qui ne sont pas de même marque et amusez-vous à faire exactement la même photo au même moment avec les mêmes réglages. Vous découvrirez alors que les couleurs et les contrastes des deux photos sont différents.

Pour ma part, quand j’ai débuté en photographie, j’ai décidé de prendre mes photos en RAW car je souhaitais avoir la main sur le développement et ne pas laisser le constructeur du boitier photo le faire à ma place.

Exemple :

Voici un avant/après d’une photo que j’ai réalisée à Agde. À gauche vous pouvez apercevoir la photo brute et à gauche le résultat après le développement sur les logiciels Lightroom et Photoshop.

La retouche :

C’est le fait d’apporter des modifications plus poussées qu’un simple développement. Changement de ciel, suppression ou ajout d’éléments, …

Comme pour le développement, la retouche photo ne date pas d’hier.

Aujourd’hui, grâce à la photo numérique et aux logiciels de post-traitement, ces techniques, autrefois réservées aux initiés, sont désormais à la portée de tous.

Sur cet exemple, on peut voir que Staline, après avoir fait supprimer un de ses collaborateurs dans la vraie vie, l’a aussi fait supprimer sur cette photographie.

Sierra Armantes, Aragon, Espagne

« Retoucher ses photos, c’est tricher. »

Combien de fois m’a-t-on dit que retoucher des photos c’était tricher et que cela trahissait la réalité. Mais de quelle réalité parle-t-on ?

Deux personnes observant un même sujet en auront nécessairement deux perceptions différentes. Le regard du spectateur est déjà un biais en soi. En photographie, la façon dont on cadre une photo, le choix de l’ouverture du diaphragme pour ajouter ou non de la profondeur de champ, le fait de jouer avec le temps de pose afin de modifier la perception d’un mouvement, etc sont également des altérations de la réalité. Le simple fait de passer une photo en noir et blanc constitue aussi une modification de l’expérience du réel. Je n’ai pourtant jamais entendu quelqu’un dire que faire du noir et blanc, c’était tricher.

Exemple :

Sur cette photo, j’ai volontairement fait le choix, à la prise de vue, d’utiliser un temps de pose très long afin que l’eau soit complètement lisse, et que les nuages soient filés, ce qui n’était pas le cas dans la réalité.

Château de Chantilly

N’oublions pas non plus que la photographie est une discipline artistique au même titre que la peinture. Serait-il approprié de dire à un peintre qu’il triche car il n’a pas reproduit à l’identique le paysage ayant inspiré son œuvre ? Je ne pense pas !

A mon sens, le photographe est un artiste qui apporte sa propre vision du sujet qu’il photographie, sa perception de l’instant.

Exemple :

Voici le Avant/après de cette prise vue, sur laquelle j’ai changé le ciel. En effet, au moment de la prise de vue, celui-ci était complétement vide et j’ai trouvé cela inesthétique. J’ai par la même occasion rajouté son reflet dans l’eau et aussi travaillé sur la colorimétrie pour que ma retouche passe inaperçue.

Je dois vous avouer que lors de mes débuts en photographie, j’ai très vite pratiqué le développement mais j’étais le premier à m’insurger contre la retouche. Ce n’est que grâce à une discussion avec un photographe, après environ une année de pratique, que j’ai changé mon fusil d’épaule. Son propos pourrait se résumer ainsi : « On a le droit d’apposer sa vision artistique, du moment que les transformations ne se voient pas. » Cela a été un véritable déclic. Aujourd’hui, avec du recul, je pense que mon rejet de la retouche était lié au fait que je n’arrivais pas à en réaliser moi-même.

« Post-traiter ses photos c’est facile ! »

J’entends souvent dire qu’avec les logiciels d’aujourd’hui, retoucher ses photos c’est super facile. Il n’y a qu’à faire comme sur Instagram, coller des filtres ou des paramètres préréglés et le tour est joué. Ou encore, depuis que le logiciel Luminar est sorti, que changer un ciel, cela se fait en un clic. Effectivement, certains photographes appliquent, sans réfléchir, des filtres et des préréglages à toutes leurs photos. Certes, on peut changer le ciel en un clic avec Luminar. Mais la plupart du temps, cela se voit et le résultat est grossier.

« Un post-traitement réussi est un post-traitement qui ne se voit pas. » Faire un bon développement ou des retouches pertinentes, cela prend du temps et nécessite de bonnes connaissances du logiciel sur lequel on travaille.  Il n’est pas rare que je mette plus d’une journée pour faire en sorte que ma photo colle à l’idée que j’ai en tête. J’effectue le plus gros de mon post traitement sur Photoshop. Il m’a fallu un certain temps avant de comprendre les bases de son fonctionnement et d’en maîtriser ses subtilités. Je continue d’ailleurs toujours à me former pour étoffer ma connaissance du logiciel dont les possibilités sont presque infinies.

« Post-traiter ses photos, ce n’est pas être un bon photographe. »

Je répondrais à cela que pour moi, c’est tout le contraire. Le post-traitement est inhérent au processus de production. Un photographe qui ne post-traite pas ses clichés ne va pas au bout de son travail. Tous les plus grands photographes post-traitent leurs photos. Post-traiter ses photos, c’est affirmer son style, définir son univers.  

Conclusion

J’espère qu’au fil de cet article, j’aurai réussi à vous démontrer que post-traiter n’est pas tricher, que la pratique de la photo s’inscrit dans une démarche artistique et qu’en photographie, le réel est tout relatif.

Pour conclure, je souhaiterais attirer votre attention sur deux points. Evitez de sur post-traiter vos photos, vous risqueriez alors de les dénaturer. Post-traiter une photo ne dispense pas d’en soigner la composition : cela reste le seul moyen de réaliser une bonne photo. Un cliché mal composé sera toujours un mauvais cliché, malgré le traitement que l’on pourrait y apporter.

Et vous qu’en pensez-vous ? Votre avis sur le sujet m’intéresse, laissez-le-moi en commentaire.

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14 Commentaires

  1. Complètement d’accord !
    Un débat sans fin lol !
    Je pense que c’est à chaque photographe de se mettre ses propres limites. S’il veut faire des photos totalement brutes, ça se respecte, mais s’il veut rajouter sa touche personnelle cela doit également se respecter.
    C’est un peu comme si on disait qu’un serveur dans un resto ou un bar était un simple porte-plateau.
    Je crois que c’est aussi en fonction de sa personnalité que l’on va apprécier le moment, revenir, ou pas !
    PS : j’ai été serveur dans une autre vie du coup cet exemple me parle Mdrr

    Réponse
    • Tout comme les personnes qui photographient en argentique développent ensuite leurs pellicules dans des laboratoires spécialisés où ils y personnalisent leurs clichés, ceux qui photographient en numérique développent et personnalisent ensuite leur fichier numérique qui est dans un format spécial appelé RAW, ( la photographie contenue dans l’appareil photo ), dans un logiciel spécialisé.
      Le rôle de cette étape est :
      1 – D’embellir au maximum la photographie grâce aux différents réglages présent dans le logiciel.
      2 – Mais également d’y donner une ambiance qui vient s’additionner à celle déjà apportée pendant la prise-de-vue, grâce, encore une fois, à différents réglages qui nous permettent de personnaliser la photographie selon notre goût.
      Certaines personnes qui ne pratiquent pas la photographie prétendent que cette partie est de la « triche », alors qu’en réalité c’est simplement le développement et la personnalisation du fichier numérique. Nous n’apportons pas un élément supplémentaire à la photographie, nous révélons simplement des éléments présents mais dissimulés par les limites de l’appareil photo.
      Développer et personnaliser une photographie c’est faire ressortir les éléments présent sur celle-ci mais dissimulés par les capacités de l’appareil photo.

      Ceci n’est ni de la « triche » ni de la retouche, mais du développement numérique et de la personnalisation.
      Si développer une photographie numérique c’est tricher, dans ce cas photographier avec un appareil photo numérique c’est déjà tricher, puisque bien souvent la photographie dans l’appareil photo n’est pas réellement représentative de la scène réelle qui, est en réalité représentée selon les réglages de l’appareil photo fait par le photographe. Alors que bien souvent, le développement numérique permet au photographe de développer la photographie de manière à ce qu’elle se rapproche le plus possible de la réalité. Encore une fois tout dépend de l’artiste car oui, un photographe est un artiste et il interprète une vision d’une scène sur un support numérique tout comme un peintre interprète sa vision sur une toile.
      Si développer une photographie numérique c’est tricher, dans ce cas faire passer une photographie en noir et blanc c’est déjà de la triche puisque d’origine aucune scène n’est en noir et blanc.
      Selon certains réglages de l’appareil photo il est possible que certaines photographies contiennent de petites particules appelées « bruit numérique ». Ces particules n’étant pas présentes dans la scène réelle, c’est donc l’appareil photo qui ment et non le photographe qui fait de son mieux pour enlever ce bruit numérique durant le développement.
      Le temps apporté au développement et à la personnalisation d’une photographie peut prendre beaucoup de temps selon le choix du photographe. Il peut également la développer et la personnaliser de manière localisée, ce qui demande bien plus de travail et donc plus de temps.
      IV – Retouche & Montage.
      Retoucher une photographie c’est déformer un élément présent sur celle-ci ou apporter un élément supplémentaire, ou encore supprimer un élément gênant. La retouche n’est pas à dénigrer puisqu’elle est très utile pour créer des images fantastiques à partir de simples photographies. Grâce à la retouche nous pouvons apporter une véritable ambiance à la photographie qui est impossible à avoir durant la prise-de-vue.
      Mais j’aime que les choses soient claires, qu’on ne dise pas qu’une photographie est simplement développée si elle est en réalité retouchée, ni qu’elle est retouchée si elle est simplement développée.
      Enlever un bouton sur un visage c’est de la retouche, apporter un effet de lumière non présent dans la scène d’origine c’est également de la retouche. En revanche, faire passer une photographie en noir et blanc, enlever du bruit numérique, déboucher les ombres ou modifier l’exposition n’est pas de la retouche mais du développement.
      Même retouchée une photographie reste une photographie tout comme un film de science fiction reste un film même si des effets spéciaux y ont été apportés.
      La photographie est bien plus facilement jugée que le cinéma car lorsqu’un réalisateur tourne un film, l’image finale n’est pas la même que celle enregistrée par la caméra, il passe par un logiciel, et on ne dit pas qu’il triche. Alors qu’en photographie, dés qu’on passe par un logiciel c’est de la triche.
      Que l’image numérique soit développée personnalisée ou retouchée ou deformée ou encore monteé, rien n’est de la triche puisqu’elle reste l’interprétation du photographe, et donc d’un artiste. Mettez-vous bien en tête qu’un photographe est un artiste et que son art est une interprétation subjective d’une scène ayant réellement existé. Le rôle du photographe n’est pas de simplement figer l’instant et de le reproduire sur un support numérique, mais bien d’y ajouter son interprétation.

      À tout cela s’ajoute bien sûr le temps d’apprentissage nécessaire pour connaître le matériel et logiciel servant au métier de Photographe car évidemment, il ne suffit pas d’acheter un appareil photo et de le régler sur automatique pour devenir photographe. Sans parler des entrepreneurs qui en plus doivent gérer leur entreprise.
      Le travail du Photographe n’est donc pas simplement de faire une séance photo, cette séance photo n’est que la partie visible de l’iceberg, mais bien plus.
      Attention ! Je ne dis pas tout cela pour faire croire que Photographe est un métier difficile, mais simplement pour éclaircir certaines idées reçues.

      Réponse
    • Belle analogie !
      effectivement c’est un débat sans fin

      Réponse
  2. tout a fait d’accord avec tout le texte et pourtant j’ai 55 ans de photographie à mon actif

    Réponse
  3. Bien d’accord. La post production permet d’affirmer son style et sa créativité.
    Sinon on aurait tous les mêmes photos.

    Réponse
  4. Tricher, c’est retoucher des photos de reportage pour changer l’opinion du spectateur sur la scène photographiée.

    Réponse
  5. Bravo pour cet article !
    En matière d’art, photo ou peinture, il n’y a que le résultat qui compte !
    L’essentiel est de véhiculer une émotion !
    Ce n’est pas l’appareil photo qui fait l’artiste!

    Réponse
    • Vous avez tout à fait raison, le principal c’est l’émotion qui ressort du cliché.
      Merci pour votre retour

      Réponse
  6. Lorsque nous sommes devant un paysage (ou autres) magique, inspirant et que nous avons perdu cette émotion sur la photo. Le post-traitement permet de retrouver cette magie.

    Réponse

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